La Vie Heureuse

Ce dieu n'est pas transcendant car n'est pas hors du monde, au-dessus de nous ... 8 ans d'exil en Corse grâce à la nouvelle femme de ... => La Vie Heu...

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SÉNÈQUE - LA VIE HEUREUSE I] SÉNÈQUE ET LE STOÏCISME : Sénèque : 1- 65 après JC. Hasard de l'histoire si le stoïcisme est resté attaché au nom de Sénèque avec le "Stoïcisme Impérial" : Sénèque, Épictète (50-125) et Marc Aurel (121-180). Pensée de Sénèque constitue un avatar tardif et bien particulier du Stoïcisme en général qui est né 3 siècles plus tôt que Sénèque. Age d'or de la Grèce Antique au temps de Socrate, Platon et Aristote. 323 (mort d'Alexandre) et 322 (mort d'Aristote) avant JC : fin de la grande époque grecque. Ensuite : période "hellénistique" (-> Stoïcisme ) : période de déclin - décadence du modèle socio-politique de la Cité - État autonome et indépendante. Création de multitudes d'États monarchiques -> tyranniques -> impossibilité de se réaliser comme homme en vivant comme citoyen -> changement radical dans le comportement. Hommes vont subitement découvrir la solitude individuelle. "déréliction" (condamnation à une certaine misère existentielle) -> hommes sont soumis à des puissances étrangères et incontrôlables. Réaction quasi-immédiate des hommes : disparition du modèle qui permettait à l'individu de s'accomplir en se mêlant au destin de leur cité -> vont reconvertir l'ancien idéal d'autarcie à leur niveau d'individu. Repli des anciens idéaux dans l'intériorité de la vie spirituelle. Apparition à cette époque de 2 écoles philosophiques concurrentes : Épicurisme et Stoïcisme. 300 av JC : fondation de l'école Stoïcienne. Zénon : fondateur de l'école mais pas de la doctrine. Ne mérite vraiment d'être appelée comme école qu'avec la doctrine achevée un siècle plus tard par Zénon puis Cléanthe puis Chrysippe. Apport successif des 3 pour aboutir à l'émergence du système Stoïcien. Première caractéristique majeure du Stoïcisme : pensée systématique -> dogmatique -> ~ secte. Nouveauté : système -> art de vivre : corps politique et organisme -> exercices spirituels. Système = repli des anciens idéaux sur la sphère privée. Systématicité de la doctrine stoïcienne = un tout -> distinction de "parties" uniquement pour la pédagogie et l'enseignement. Parties : physique, logique et dialectique ou morale. Impensable de toucher à une de ces parties sans entraîner la ruine de tout le reste. Stoïcisme = "philosophie-bloc" (Bréhier). Doctrine Stoïcienne est systématique car se veut le reflet de la systématicité de l'univers. Un tout parfaitement organisé et qui doit la perfection de son organisation au fait qu'elle dépend de l'action d'un principe unique organisateur de l'univers : PNEUMA (physique) = "souffle vital" ou LOGOS = "raison", "discours" (liaison des évènements qui surviennent = destin, providence) => DIEU. Ce dieu n'est pas transcendant car n'est pas hors du monde, au-dessus de nous => immanence du principe organisateur de l'univers. Pour le Stoïcisme : le monde est Dieu et Dieu est le monde. Spinoza : Deus sive natura (Dieu ou la nature). Leibniz : Le monde est le meilleur des mondes possibles. Rien dans la nature n'arrive sans raison -> mauvaises choses (maladies, catastrophes, morts, … ) ne sont mauvaises qu'en apparence, sont nécessaires à l'organisation d'un ensemble qui est le meilleur possible. A regarder comment se compose l'œuvre de Sénèque : presque exclusivement tournée vers la morale. Dans la Vie Heureuse place que pour la morale -> assez particulier pour le Stoïcisme cependant après avoir traité de la physique dans Questions Naturelles, Sénèque ne considère pas très profitable de s'y attarder longuement et consacre donc le reste du temps à la question de la morale, tout en se conformant à la physique et la logique des Stoïciens-> Sénèque veut nous instruire sur la vocation première du Stoïcisme depuis sa fondation 3 siècles plus tôt : art de vivre, recette pour atteindre à la Vie Heureuse. Pour développer ces recettes, on a besoin des soubassements que sont la physique et la logique mais plus pour les utiliser. Les Bienfaits (livre VII) : physique et logique : "spéculations qui assouplissent mais qui ne musclent pas l'intelligence". "l'esprit se retire dans sa forteresse". -> repli sur soi, citadelle intérieure : autonomie, autarcie. -> Stoïcisme inséparable de la naissance de "l'intériorité". On a donc ici un parti pris délibéré de Sénèque => Stoïcisme de Sénèque : "école de bonne conduite accompagnée". Doctrine Stoïcienne accompagne simplement le postulant à la sagesse dans la voie de la conduite idéale. -> transmettre invariablement les recettes du bonheur : "exercices spirituels". En écrivant la Vie Heureuse, se propose de fournir la formule abrégée de ce qu'est pour lui le Stoïcisme.

II] DE LA VIE HEUREUSE : Par son titre même, ça traité vaut comme "digest" du Stoïcisme -> espèce de "catéchisme" car école Stoïcisme ~ secte car la plupart des thèses de la Vie Heureuse se retrouvent dans d'autres œuvres stoïciennes. On a affaire à un traité car Sénèque fait preuve du didactisme requis à tout exposé assimilable à un traité : va s'efforcer à démontrer ses thèses. Expose ici des thèses Stoïciennes classiques. Chapitre 17 : brusque changement de ton : on ne peut plus alors considérer ce texte comme un traité mais comme un pamphlet -> plus de place pour la démonstration ; violence, outrance du propos. Disparité de ton autant que de contenu pose le problème de l'unité du livre, cependant on ne peut pas parler de 2 propos distincts complètement juxtaposés : Propos objectif, neutre sur une question générale /// subjectif, partisan sur une attaque personnelle => lecture trop simplificatrice du texte. => D'autres points à examiner :

1°) Vie de Sénèque : Sénèque est né à Cordoue : "étranger" de Rome. Issu d'une famille aisée, 2° des 3 fils (aîné : Gallion). Père nourrit des ambitions très grandes pour ses fils -> envoie ses fils étudier à Rome -> entre 15 et 20 ans découvre la philosophie et notamment le Stoïcisme -> il s'y convertit. Jusqu'à 35 ans, assez obscur ~ enseigne la philosophie. ~ 40 ans : Sénèque décide d'entrer en politique, veut faire de la politique en philosophe (idée typiquement grecque, grande idée de Platon, pas idée Stoïcienne)-> Sénèque se nourrit à tous les râteliers (Platon, Aristote, Stoïcisme, …). En quelques mois, cet obscur philosophe devient une "star" (grande personnalité au Sénat) grâce à ses talents d'orateur. Va se lier avec la famille impériale (empereur Caligula a 3 sœurs -> torride avec Sénèque). Son succès est fulgurant mais ne dure pas : Caligula meurt un an après -> nouvel empereur Claude condamne Sénèque pour adultère et est condamné à 8 ans d'exil en Corse grâce à la nouvelle femme de Claude, Agrippine (en "bons termes" avec Sénèque, sinon condamnation à mort…). -> Écrit beaucoup et à son retour, accueilli en héros à Rome et devient le plus grand écrivain vivant de sa génération. Pendant 10 ans : succès, activité intense sur plusieurs fronts : publie beaucoup, politique (Sénat), devient précepteur de Néron (fils d'Agrippine), augmente colossalement sa fortune qui prend des dimensions gigantesques. On estimait la fortune de Sénèque à cette époque à 1/6 du budget annuel de l'Empire. Il a fait travailler son argent et en a gagné beaucoup avec ses œuvres et couvert d'or par Néron quand il est devenu empereur -> convoitises et jalousies par rapport à sa richesse insolente, on lui reproche de pratiquer l'usure. Va être accusé de corruption de la jeunesse, flatterie à l'égard de Néron (qui l'a nommé Consul -> le premier non romain), liaison avec Agrippine, … Mauvaise réputation de Sénèque grandit. Néron fait assassiner Agrippine (sa mère) car la "soupçonne" d'être à la tête d'un complot. Sénèque aurait souhaité s'éloigner de Néron mais impossible car sinon on aurait compris la véritable raison du meurtre -> lui a ordonné de se suicider (ses 2 frères suicident la même année). -> Destinée exceptionnelle de Sénèque. La Vie Heureuse : contemporaine des scandales -> pouvait s'en servir pour assurer sa défense.

2°) Compréhension qu'avait l'Antiquité du bonheur : Pour nous, "bonheur" = sentiment subjectif qui n'intéresse que la sphère de la vie privée, très différent au temps de Sénèque. Pour eux : notion parfaitement objective : bonheur d'un homme ne se décide pas dans le for intérieur de l'intéressé. Nul ne peut trancher pour son compte s'il est heureux ou non. Pour savoir si un homme est heureux : opinion publique et sages seuls habilités à décider -> bonheur d'un homme soumis à des débats publics. Gorgias : dialogue Socrate / Polos : savoir si Archélaos le tyran peut être regardé comme un homme heureux. Hérodote (IV° S av JC) : raconte l'histoire de Solon, l'un des sages que connaissait Athènes au VI° S av JC. Solon rend visite au roi Crésus qui lui demande si, avec tous ses trésors, pouvait être considéré comme heureux -> bonheur fait l'objet d'un décret. Réponse Solon : pas Crésus l'homme le plus heureux des hommes mais un certain homme qui a jouit toute sa vie d'une richesse modeste mais qui a vu grandir des fils beaux et vertueux et est mort pour sa patrie -> honneurs publics et proclamé post-mortem l'homme le plus heureux des hommes. Bonheur -> sens de la vertu, associé au goût pour la gloire. -> si on est déclaré heureux, sa vie doit être enviable par tous les hommes honnêtes. -> recherche du bonheur proclamée atteinte -> intronisé exemple à suivre, modèle. Soit c'est la communauté qui va juger comme ayant droit au bonheur -> comblé car citoyen exemplaire. Soit sages -> conforme à la conception idéale que le sage se fait de la nature et de la destination de l'homme.-> prototype le plus achevé de l'humanité. Aristote, Éthique à Eudème : "le mot de Solon est juste suivant lequel il ne faut pas béatifier quelqu'un de son

vivant mais seulement lorsqu'il a atteint la fin de sa vie car rien d'imparfait n'est heureux puisqu'il n'est pas entier". Aristote, Éthique à Nicomaque (livre I, 12): "le bonheur rentre dans la classe des choses dignes d'honneur et parfaites". Comme c'est du mérite d'être heureux -> bonheur est un honneur. Donc réaction si vive de Sénèque dans la deuxième partie de la Vie Heureuse car le fait de voir son nom associé à une vie pas irréprochable, si son nom est sali => ne pourra pas être, à sa mort, considéré comme heureux. Enjeu : parachèvement de la vie heureuse. Parcours pour atteindre la Vie Heureuse va être bloqué si ses semblables ne le lui permettent pas, à cause de ces problèmes, de gardes un parcours et un nom irréprochable. => fracture de l'œuvre ne compromet pas l'unité du livre au vu de ses aspects biographiques et de la compréhension antique du bonheur. => La Vie Heureuse : traité illustré du bonheur, conforme au projet du Stoïcisme. Mise en scène de l'homme Sénèque vaut comme accompagnement du projet de faire "école de bonne conduite".

III] LA VIE HEUREUSE, PREMIÈ REMIÈRE RE PARTIE: LA RECHERCHE DU BONHEUR: 1°) Chapitre 1 et 2 : Introduction générale : La "méthode" du bonheur: Incipit : référence implicite à un texte fondateur de la recherche du bonheur : Éthique à Nicomaque d'Aristote. Stoïcisme = doctrine dogmatique : ce traité permet de relativiser ce dogmatisme. Va chercher à assumer tout un héritage de pensée même s'il n'appartient pas au Stoïcisme. Bonheur = souverain bien recherché par tous les hommes. Universalité de la recherche du bonheur mais pas d'unanimité autour de sa définition -> paradoxe. Pour tous les hommes : "désir naturel" et conçoivent le bonheur "d'après la vie qu'il mènent". Bonheur : idéal de l'existence, déterminé uniquement à partir des conditions de la vie concrète. En l'absence de critères universels, condamnés au tâtonnement individuel. Déterminer un idéal à partir de déterminations concrètes -> impasse logique. -> Sénèque veut mettre en place une "méthode " du bonheur. Remarque : le mot "méthode" est absent du texte mais l'idée y est : méthode = HODOS : voie, chemin, route. Foule d'images relatives à l'orientation, la direction, l'errance, l'égarement dans ces premières pages. Sénèque : "la foule" = "la preuve du pire" aussi une idée d'Aristote. DOXA (Platon): "opinion" -> conviction irréfléchie, contingente, aléatoire -> arbitraire. Opinion inapte à servir de guide dans la recherche du bonheur. Si on se satisfait de l'opinion : "méthode" la meilleure pour aller à rebours de ce vers quoi on tend. > "alternative à l'opinion" : parvenir à substituer la raison à l'opinion = "esprit d'imitation" -> faut onc s'affranchir de toute espèce de mimétisme servile. => solution = conversion à la philosophie, passer de philadoxe à philosophe. Conversion = renversement de l'attitude de la foule qui préfère "croire" plutôt que "juger". Philosophie : plutôt "juger" que "croire". Au lieu de l'adhésion aveugle (croyance) de la foule, il faut les "lumières" d'un jugement éclairé, vrai. -> pas d'accès possible au bonheur (= le souverain bien) qui ne passe pas par la connaissance de la vérité => bien = beau = vrai (idée de Platon) p19 : "ce qu'en vérité il vaut mieux faire et non ce qui est le plus en usage". Âme = "principe vital", principe ordonnateur, constitutif de ce que nous sommes singulièrement. Retour de l'âme sur elle-même = effort de discrimination du faux et du vrai -> recherche des critères du vrai et du bien. Recherche du bonheur est individuelle, personnelle. Cependant on ne peut considérer que cette recherche n'implique personne d'autre. Retour de l'âme sur elle-même -> recherche de la vérité du bien suprême -> indispensable au bien commun /// salutaire du point de vue de la félicité publique. Devoir de rectitude morale envers autrui que de chercher à s'écarter de la foule. Après avoir parlé de retour de l'âme sur elle-même = monologue intérieur de Sénèque -> examen de conscience = "exercices spirituels" des Stoïciens. ->faire une liste de ce qu'il ne faut pas faire. => condamnation porte sur la vie "mondaine". Par un retour sur elle-même, l'âme voit qu'elle s'est trop détournée de la voie du bonheur par l'influence, le prestige, la recherche du pouvoir = "comédie humaine". Condamnation justifiée par le fait que ce mode de vie est inadéquat au bonheur car on s'expose aux déchirements, aux conflits intérieurs => impossible d'arriver à la paix de l'âme. Âme ne gagne jamais sa propre amitié=> n'est jamais en paix avec elle-même, en tranquillité. Salut passe par le retour de l'âme sur soi. Amitié = PHILIA (Aristote, Éthique à Nicomaque ) : archétype du rapport à soi. => formule du bonheur : passe nécessairement par une conversion qui conduit à un retour de l'âme sur ellemême (rapport à soi).

2°) Chapitre 3-4-5 : Le bonheur véritable : Ne pas rechercher les biens extérieurs (apparences) mais bien véritable = solide, permanent, beauté secrète. Impasse logique -> implications morales désastreuses -> spirale du désir -> ferme l'accès au bonheur en condamnant à ne posséder que des "biens" éphémères. -> échec dû à une insatisfaction perpétuelle. Échec = poursuite des biens illusoires (séduction des choses extérieures) . Réussite = intériorité. Tout conduit à souligner le renversement de perspective du point de vue de Sénèque de l'échec de la foule -> réussite du "sage" dans la quête du bien véritable -> rareté du bien -> apparente difficulté à le trouver. Mais apparence seulement, en effet il est tout proche mais c'est seulement un "secret". Démarche ici de Sénèque : fixe l'orientation, le but, la fin. A proposer la quête d'une telle fin (dont la beauté est si "secrète") => peut décourager par sa perfection, si caché qu'on peut douter de la réalité de son existence. -> Questionnement sur la réalité de ce bien. -> de suite, Sénèque ajoute que ce bien non seulement existe mais qu' "on le trouvera, il suffit de savoir vers quoi tendre la main". => si on a échoué dans la recherche du bonheur, c'est par manque de savoir. Ténèbres de l'ignorance : cause de l'échec. -> requiert qu'on parvienne à ce savoir relatif à la Vie Heureuse. La Vie Heureuse est donc tributaire d'un savoir => unité du bien - beau - vrai : seule une connaissance du VRAI BIEN amène au bonheur. Le savoir nécessaire à la Vie Heureuse est celui qu'ont développé tous les stoïciens avant lui. Savoir = "se régler sur la nature" -> faut donc préciser ce qu'entendaient les stoïciens par le terme "nature". Diogène Laërce : "ils entendent parfois par nature ce qui fait tenir le monde ensemble (= LOGOS) et parfois ce qui fait pousser les choses sur la Terre (= PNEUMA)" -> principe organisateur du monde "souffle vital" et "raison calculatrice" qui fait advenir le meilleur des mondes possibles. => Nature est à la fois logos et pneuma -> va désigner l'ensemble de ce qui existe mais aussi ce qui préside à l'existence de ce tout. -> pour atteindre au bonheur -> "obéir à Dieu" car Dieu est présent dans sa création -> se régler sur l'ordre naturel et rationnel de la providence, du destin. Sagesse = comprendre qu'il faut accepter ce qui est donné. "rerum naturae assentio" = je consens à la nature. -> accepter l'ordre naturel des choses, se conformer à cet ordre. -> sagesse fataliste. ("fatum" = destin ou donnée). La sagesse consiste donc à accepter son sort = il ne faut aspirer qu'à ce qui arrive. Si on ne désire rien d'autre que ce qui arrive => attitude qui met à l'abri de la frustration, du manque => être comblé, satisfait -> échapper à une spirale du désir. Faut donc se régler sur la nature. La Vie Heureuse c'est celle qui est en accord avec sa propre nature = notre nature particulière permettant de justifier toutes les excentricités. Évoquer notre nature = se placer sous l'autorité d'une irréductible souveraineté individuelle. Sa nature = sa nature particulière d'individu = son principe constitutif = l'expression de la nature. => sa nature ~ la nature : tout est ordonné, tout obéit à un dessein. Être en accord avec sa nature = savoir reconnaître et accepter que la place qui nous réservée participe à l'organisation d'ensemble de l'ordre universel rationnel. => Formule du bonheur = "trouver sa place dans l'univers". Reconnaître => "représentation compréhensive" = PHANTASIA KATALEPTIKE (grec) et critère de la vérité = SEXTUS EMPIRICUS (latin). => Donc secret de la Vie Heureuse = représentation compréhensive de la nature. Formule de la Vie Heureuse = conversion du regard. Pour être heureux : faut et suffit de modifier sa vision des choses en vue seulement de la représentation compréhensive. -> éthique : activité théorique qui va consister en une transformation du regard -> école de la bonne compréhension. Pour les Stoïciens : 2 types de représentation (images mentales que nous avons des choses). Possibilités dans notre esprit que des représentations soient non compréhensives : fantasmes, vues de l'esprit ou vues de choses réelles avec une représentation déformée, non réflectrice de la chose. Les représentations sont indépendantes de notre volonté. Une seule chose dépend bel et bien de nous : distinguer les représentations compréhensives de celles qui ne le sont pas -> tri : ne conserver que les compréhensives. La Vie Heureuse réclame donc une discipline de l'esprit, elle se fonde sur un jugement droit et assuré. => le bonheur vrai pour Sénèque = le bonheur de la vérité. P22 (ch3) : Sénèque établit une hiérarchie des qualités de l'âme, de la disposition la plus générale à l'aptitude la plus particulière. Première qualité : santé de l'âme = condition préalable et absolument nécessaire, mais Sénèque ne précise pas en quoi consiste cette santé, car pour lui, cela va de soi : d'après le contexte, santé de l'âme = rectitude du jugement, aptitude à former des jugements vrais. Donc première des conditions de la Vie Heureuse : vertu intellectuelle. Ensuite : qualités physiques, pratiques (mais secondaires) : courage, énergie, patience. La santé de l'âme enveloppe ces qualités secondaires. On voit ici que la vertu première est intellectuelle => VRAI. Bien véritable = bonheur de la vérité. C'est donc au prix de cette

connaissance du vrai, que seule rend possible la santé de l'âme, qu'on arrive au bonheur. Bonheur résulte de la vertu fondatrice du jugement droit et résulte immédiatement du vrai -> parfaite solidarité entre jugement droit et Vie Heureuse. -> Vie Heureuse n'est plus un horizon, une promesse, c'est un "fait" = c'est l'état naturel de l'âme saine => "tranquillité, liberté perpétuelles" (p23) -> rançon de la délivrance des chaînes du désir. => Opter pour la réalité d'une Vie Heureuse et non se satisfaire d'une possibilité de bonheur. Attendre un bonheur possible, c'est compromettre ce bonheur : attente, espoir, … contradictoire avec le bonheur. Ch4 : homme heureux : "rien de bon ou de mauvais hormis une âme bonne ou mauvaise" -> "santé". p25 : "l'homme met sa joie dans ce qu'il possède et ne désire rien de plus que ce qu'il a en soi" car en nous réside la santé de l'âme. "santé de l'âme" -> "retour sur soi", "respiration de l'âme" -> vie => assurance dans la définition du bien véritable -> on le trouvera car à portée de main. => âme = principe même de la Vie Heureuse. Paradoxe ici : faut se régler sur la nature /// sur sa nature. -> faire en sorte que l'âme aille chercher en elle-même sa recette du bonheur -> se plier à une loi -> faut trouver une issue vers la liberté. Choses extérieures qui soumettent les hommes à la tyrannie du désir sont écartées. => seule et un que condition pour être libre -> se plier à sa propre nature => Sénèque : "être libre" Ù être heureux. Paradoxe = liberté consiste en une soumission. "gaieté perpétuelle, profonde allégresse qui sourd du tréfonds de l'être" Retranchement de l'âme en elle-même aussi une façon de ne se fier qu'à ce qui est effectivement donné, circonstances présentes, "se fier à l'instant présent". Ceci résume bien un passage de l'Éthique de Spinoza (ch4, appendice 4° partie) : " la béatitude n'est pas la récompense de la vertu mais la vertu même". P26 : "on peut appeler heureux celui qui est exempt de désirs et de craintes grâce aux bienfaits de la raison". Désirs et craintes = passions de l'âme -> occasions de souffrir => la Vie Heureuse est sans passions = apathie.

3°) Chapitre 6 à 16 : Bonheur, plaisir et vertu : Chapitres 6, 7 et 9 : Eudémonisme : toute théorie faisant du bonheur la fin suprême (EUDAIMONIA = bonheur en grec). Pour Sénèque, "intellectualisme" car on atteint au bonheur qu'avec cette discipline de l'esprit, de l'âme. Repli -> purification de l'âme, purgation -> orientation thérapeutique de la sagesse stoïcienne. P27 : on atteint au bien véritable en se mettant à l'abri des maux -> âme imperméable aux choses extérieures, mais l'est-elle aussi pour les choses agréables? Les biens extérieurs ne sont-ils nullement susceptible de participer à la Vie Heureuse. => rapports de l'âme heureuse et des plaisirs? Fin ch5 : début de réponse assez expéditif sur la question des plaisirs sensibles = voluptés. Dualisme corps - âme-> unique attention pour arriver à la Vie Heureuse. "chatouiller" : disqualification des plaisirs sensibles : émoustille, excite, paroxysme d'une extase -> aussi intense que soient ces moments où la volupté corporelle agit, jamais l'intensité ne pourra compenser la brièveté. Bien véritable = permanent, solide -> ne pourra jamais être égalé par les voluptés. Ch6 : Sénèque concède l'existence des voluptés de l'âme, mais va se refuser à les traiter comme les voluptés corporelles car possèdent la permanence : capacité de se dilater dans le temps : l'âme peut se reporter au passé, se souvenir des plaisirs abolis. Capacité à tendre vers le futur, préparer la satisfaction de ses désirs -> jouit à l'avance des plaisirs -> espérance, crainte et souvenirs => nostalgie, regrets pour les anciennes jouissances. => troubles de l'âme, incompatibles avec la tranquillité, la santé de l'âme. En se concentrant sur ces troubles => folie, mal. Poursuite de la volupté intellectuelle satisfait au critère de la permanence du bien suprême mais n'aboutit pas à la Vie Heureuse car à place d'un bien => mal. Plus misérable encore qu'on ne l'est si on recherche les plaisirs. En regardant dans le passé et l'avenir : pas d'attention au présent (= solidité) : poursuite d'illusions, pas solide =\= bien véritable. Donc bonheur = "aimer ce que l'on a déjà", proximité du bonheur. Ch7 : plaisir - volupté : introduction motivée logiquement car âme saine est imperméable aux maux, question aussi pour les biens? -> plaisirs, voluptés "possibles biens" mais en réalité ne le sont pas. Volupté : analysée sur un ton polémique -> en tant que certains entendent du plaisir le souverain bien -> hédonisme = école épicurienne -> règlement de compte ici. Volonté pour Sénèque d'invoquer l'autorité d'Aristote par des références à l'Éthique à Nicomaque " la foule et les gens les plus grossiers disent que le bien et le bonheur, c'est le plaisir". => parce qu'ils ont une préférence pour la vie de jouissance qu'ils conçoivent l'idéal du bonheur de la manière dont ils vivent. Foule préfère le plaisir car a une forte inclination pour la vie de jouissance "foule" = "vie bestiale". P29 : "la volupté conduit à la vie la plus ignoble" (-> sens littéral = privé

de noblesse). Comme Aristote, Sénèque va opposer au point de vue de la foule celui des "gens cultivés" -> vivre honnêtement, avec honneur -> au fondement même de toute noblesse. Le débat va donc porter sur le choix entre vie de plaisir et vie vertueuse. Ch16 : "c'est sur la vertu que s'édifie le véritable bonheur" -> voyons comment va le prouver. Ch7 : Condamnation de l'hédonisme, motivée par défaut théorique de cette doctrine : plaisir = lieu vil pour bien véritable. Hédonistes ont conscience du fait que leur parti pris est moralement blâmable. -> vont essayer de sauver leur doctrine par des sophismes -> faussetés -> sauver la doctrine par l'identification de la vertu et des plaisirs. Sénèque conteste la légitimité de cette identification en se réglant sur les faits -> différenciation possible des plaisirs et de la vertu. Incompatibilité entre plaisirs et vertu car plaisir et vertu seraient 2 notions contraires mais juste avant écrit que vertu jamais beaucoup accompagné de beaucoup de volupté mais jamais privée complètement. Sénèque dénonce dans ces pages le sophisme des hédonistes mais semble en faire un aussi : plaisir =/= vertu mais vertu accompagnée de plaisir. Cependant, ensuite va apporter des éléments qui vont expliciter ces positions, se trouvent au ch9 : p35: plaisir = en surplus de la vertu -> bonus dans la pratique de la vertu ,valable ssi vertu = souverain bien ,ce qu'il y a de plus haut, fin suprême. -> on poursuit alors la vertu pour la vertu et non pour ce que l'on pourrait obtenir en plus -> pureté de l'intention vertueuse permet la réconciliation des contradictoires. Possible plaisir associé à la vertu -> récompense inattendue ou non finale pour l'action faite. Impossible que recherche du plaisir = cause motrice vertueuse. P36 : "c'est le bien de l'homme que je cherche et non celui du ventre". Caractère d'incomplétude du plaisir -> apparition disparaissante. Sénèque ne cessera de souligner le caractère de parfait achèvement de la vertu. P31 : "le souverain bien est immortel, […] la volupté, au contraire, au moment même où elle charme le plus, s'éteint". P36 : "Elle ne procure rien qui vaille mieux qu'elle, étant elle-même sa propre récompense". Accès de la vertu au titre de bien suprême explique pourquoi on ne la recherche que pour elle-même. Au nom de quoi est préférée la vertu pour accéder au souverain bien? ch8 : parle exclusivement de la vertu mais pas explicitement : "la vie la meilleure" = la vie vertueuse car raisonnement de Sénèque = opposition entre vertu et volupté -> la vie la plus agréable donc vertu => la vie la meilleure seule implication valable et imaginable. Rq: vertu = VIRTU (latin) - ARETE (grec) pourrait aussi être traduit par excellence => la vertu est excellence -> la vie vertueuse = la vie la meilleure. La vie vertueuse est absolument conforme à la façon dont a été défini le bien véritable = le souverain bien. Sagesse stoïcienne : se régler sur la nature. Bien véritable recherché par Sénèque pour échapper à l'impossibilité d'une Vie Heureuse dans la recherche des biens illusoires. Bien véritable = bonheur. P32 : "même chose de vivre heureux et de vivre selon la nature." Vivre selon la nature = vie vertueuse donc vertu = secret du bonheur. Raison prescrit, ordonne, commande non pas arbitrairement mais selon la nature -> raison rien d'autre que la nature réfléchie. Raison : réflexivité de la nature-> se régler sur la nature. Vivre selon la nature ne veut pas dire s'abandonner à une puissance obscure qui nous gouvernerait (instinct, pulsion,…) mais adapter la nature à la conduite de notre propre existence -> conformément à la nature propre de l'homme. Raison fait figure de dénominateur commun entre l'univers qui tout embrasse et nous même qui en sommes les parties. Double mouvement dans l'action de la raison divine (LOGOS). -> s'étend aux choses extérieures pour rentrer ensuite en elle-même (PNEUMA). Vertu comme mouvement perpétuel centrifuge et centripète. P33 : "qu'il soit l'artisan de sa vie". Normativité rationnelle procède de la normalité naturelle. Tout se passe comme si Sénèque s'appliquait à décrire un cercle de la vie vertueuse. Raison commande de se régler sur la nature qui elle-même est dirigée par la raison -> raison nous demande de se régler sur elle-même. Nature = tout de l'univers animé par le LOGOS. Accomplissement possible de notre nature d'homme en se mettant en harmonie avec la nature grâce à la raison. Accomplir sa nature = "réaliser l'unité de son essence" (p34) même chose que de parvenir à l'harmonie - paix de la raison. Vie vertueuse est celle où l'on se règle sur la nature => sur DIEU donc homme vertueux est à l'image de DIEU et a donc atteint la perfection. Vertu a cet avantage de nous rendre comme Dieu souverain ("l'artisan de sa vie"). => bien souverain ne peut être placé autre part que dans la vertu. P50 : vertu assimilable au souverain bien car souverain bien (SUMMUM BONUM = le sommet du bien) = élévation, hauteur -> pureté, inviolabilité, invincibilité => DIVIN. Donc par le souverain bien on atteint à un point culminant. Seule la vertu admet cette caractéristique de culminer tout => DIVINE. Souverain bien inaltérable - immuable. P52 : "ni les assauts du mal, ni les conséquences du bien ne peuvent te faire changer […] afin que tu imites la divinité". -> immutabilité du bien. Vertu peut imiter autant que faire ce peut le divin car ouvre la dimension de l'éternité. Imiter la divinité =/= l'égaler pour Sénèque : "même le sage ne peut être regardé comme égalant Dieu. Même si parfaite qu'elle soit, sa

souveraineté n'est que relative". On imite la divinité "dans la mesure où cela est permis". Vertu doit garder présent à l'esprit le précepte "Suis Dieu". Sage si vertueux qu'il soit, ne se contente que d'emboîter le pas du dieu => souveraineté relative. Vertu elle-même fait l'objet d'une recherche, confondue avec la recherche du bonheur car même chose que de rechercher la vertu et d'approcher du bonheur. Suivre dieu = obéir à dieu => se soumettre à sa loi -> se régler sur la nature. P51 : "obéir à dieu, voilà la liberté". Sage : souveraineté relative et Liberté compatible avec obéissance, soumission -> ces idées se retrouvent chez Spinoza, Rousseau, Kant ( Rousseau : "l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté"). Idée un peu paradoxale mais Sénèque le lève vite : p51 : "engagés à supporter ce qui est propre à notre condition de mortel" = écho au précepte : "se régler sur la nature" ou "être en accord avec sa propre nature". Donc obéir à la nature c'est supporter ce qui nous est propre. Faut trouver une formule de vie qui nous soit appropriée, seulement dans cette attitude qu'on peut atteindre à la Vie Heureuse. Liberté /// souveraineté : effort d'appropriation de soi par appropriation à soi. OIKEIOSIS (grec), DOMICILIATIO (latin) = appropriation ,domiciliation -> possibilité de se retrouver en lui-même comme étant chez soi, dans un état de conformation / sa nature -> tentative pour éviter l'aliénation car Vie Heureuse = santé de l'âme. Vertu = appropriation /// volupté = possession -> même idée mais 2 attitudes parfaitement distinctes car voluptueux est possédé. P46 : "ceux qui ont abandonné les rênes à la volupté, c'est la volupté qui les possède". -> dépossédé de lui-même, privé de la jouissance de soi. Voluptueux se réduit lui-même en esclavage en se soumettant à des puissances extérieures. Alors que le vertueux se donne les moyens. P51 : "nous sommes nés dans un royaume" -> nous sommes sujets, assujettis. Mais assujetti =/= esclave car pas nécessairement servile. Véritable sujet : pas serf car possibilité d'être logé à la même enseigne que tout le monde => participer au système dans lequel il se trouve. Obéir à dieu = liberté tant que nature = principe ordonnateur, pacificateur de toute chose. Appropriation du vertueux : compréhension de la place qui nous est propre. P5051 : "quelle folie de se laisser traîner plutôt que de suivre" ("suis Dieu"). Suivre = attitude active, fait de son plein consentement, seule attitude libératrice, émancipatrice. Par conformité avec divinité : loi naturelle, on accède à la seule liberté envisageable, on ne veut plus que ce que Dieu veut -> on ne veut que ce qui advient -> abolition de tout désir d'attente de vœux -> pleinement satisfait. Spinoza : Traité politique II " J'appelle libre tout homme, dans la mesure où il vit sous la conduite la raison, parce que dans cette mesure même il est déterminé à agir dans des causes pouvant être connues adéquatement par sa seule nature". -> la vie sous la conduite de la raison est liberté car vie selon la nature. IV : "la vrai vertu ne consiste en rien d'autre qu'à vivre sous la conduite de la raison et l'impuissance consiste en cela seulement que l'homme se laisse passivement conduire par les choses qui sont hors de lui, étant ainsi conduit à accomplir ce qu'exige non pas sa propre nature mais la constitution commune des choses extérieures". Épictète (ancien esclave, stoïcien ) : Entretiens : "non mon ami, la liberté consiste à vouloir que les choses arrivent non comme il te plaît mais comme elles arrivent". Sénèque : Lettres à Lucilius lettre 76. P52 : " la vertu suffit pour être heureux". Vertu consiste dans le perfectionnement de sa propre nature. P4546 : "que proposer de mieux que la raison à ceux auxquels le sort a donné une nature raisonnable?". En vivant suivant sa raison, l'homme s'accorde au logos divin réalise ainsi ce que les premiers stoïciens appelaient HOMOLOGIA : bonheur = homologie selon Cicéron (un siècle avant Sénèque) : idéal humain, développe un comparaison, p52 : "clémence de la fortune". Vertu suffit au bonheur mais ne suffira pas au bonheur total sans un certain coup de pouce. Cicéron distingue le SKOPOS = but et le THELOS = fin. Justifie avec comparaison : image de l'archet : son but = mettre dans le mille et sa fin = exercer au mieux son talent d'archet. But non assuré, dépend de la chance mais si place son bonheur dans le fait, d'attendre le but > pas sûr d'y arriver mais le bonheur est garanti si mis dans la recherche de la fin, on a tout le bonheur qui dépend de nous. But de l'homme : Vie Heureuse et fin de l'homme : vertu. Si par la vertu peut atteindre le bonheur, préférable. Véritablement à rechercher = vertu.

IV] LA VIE HEUREUSE, SECONDE PARTIE: REPONSE A QUELQUES OBJECTIONS - DEFENSE DE LA PHILOSOPHIE: Seconde partie contraste avec la première partie : ton polémique, subjectivité du propos. Fondements philosophiques permettent de distinguer la seconde partie d'un plaidoyer de Sénèque pro domo : statut de la philosophie et du philosophe et théorie des "préférables".

1°) Statut de la philosophie et du philosophe : Dès sa naissance : Stoïcisme s'est heurté à sa principale école rivale : Épicurisme. Tous les stoïciens ont eu des querelles avec des Épicuriens. En dépit de cette concurrence, pas de vues partisanes excessives dans la seconde partie. Sénèque ne va pas dans le dogme stoïcien => joue la carte de l'ouverture. Écrit p43 : "je suis pour ma part d'avis […] que les enseignements d'Épicure sont vénérables et justes". => défense de la philosophie = passer outre les querelles doctrinales et techniques des différentes écoles philosophiques. Sénèque voit clair dans l'épicurisme -> rivalité dans la terminologie "loi du plaisir" et "loi de la volupté" car souverain bien => suivre la loi de la nature dans les deux cas. -> Sénèque joue les conciliateurs mais différent d'un infléchissement de la doctrine stoïcienne dans le sens d'un "syncrétisme" => plutôt consensus sur le sort généralement habitué aux philosophes de toute obédience. P56 : "Platon, Épicure, Zénon" => quelque soit l'obédience, objections ont étés faites -> veut révéler une constante historique. On a toujours et partout reproché aux philosophes la non-conformité entre leur vie et leur doctrine. On leur reproche une forme d'hypocrisie ou d'imposture. Sénèque joue sur le fait que démarche spontanée de l'opinion : juger de l'idéal d'après la réalité => en droit de faire valoir écart entre vie et pensée des philosophes. Propos de Sénèque : dénoncer le caractère fâcheux de cette opinion. Procès qu'on intente aux philosophes est rendu caduque par le fait qu'il repose sur un postulat anti-philosophique. Accusateurs : p56 : "individus mal intentionnés" = pensent mal car philosophes : "tous ont dit non pas comment ils vivaient eux-mêmes, mais comment ils auraient dû vivre". Esprits infâmes => étrangers à la philosophie = concept = vertu. "c'est de la vertu et non de moi que je parle". Sénèque a écrit un traité philosophique et non des "confessions" donc confusion rationnelle entre idéal et réalité => pour gens mal intentionnés, confusion entre traité philosophique et confessions intimes -> renversement : aussi longtemps que l'on sera en mesure de constater le divorce entre les faits et les propos, il faut "féliciter" les philosophes pour leur travail. Ce qui sert la foule à discréditer le philosophe sert en fait à son crédit. Sénèque incrimine la bêtise de ses détracteurs. Ensuite (ch19) va plutôt contre la méchanceté -> conscience aiguë et malheureuse des défauts de son existence. S'il parvient à convaincre que tous les hommes sont misérables -> n'est pas responsable de ses défauts. Sont inhérents à le condition de l'homme -> pas sa faute personnelle au méchant => chaque progrès de l'homme de bien va révéler ses insuffisances = ce qui anime ses adversaires : sentiment de culpabilité, se sent coupable de na pas pouvoir imiter l'homme de bien = sait qu'il devrait tendre vers la vertu => complaisance dans le vice ne lui procure aucun bonheur. Pas prêt à consentir les efforts nécessaires pour atteindre au bonheur -> attaque les imperfections des hommes de bien pour lui permettre de légitimer ses carences personnelles. Méchanceté = haine qu'il a pour lui-même et pour la vie qu'il mène, comme s'il cherchait à soulager son propre malheur en dénonçant les imperfections des hommes de bien. Ressentiment finissait par se retourner contre lui-même : p59 : "ceux qui ont l'esprit tourné que vers eux-mêmes sont écartelés par autant de croix qu'il ont de convoitises". Ch20 : propose une ré interprétation de l'objection de la non conformité. Suivant : malveillance / méchanceté et manque de discernement / bêtise. P59 : "les méditations salutaires, fussent-elles sans résultat immédiat sont une occupation louable". Souverain : compte tenu de la difficulté -> échec permis sans démérite. P60 : "homme véritable se doit d'admirer, même lorsqu'ils chutent, ceux qui entreprennent de grands efforts" -> au lieu de haine, raillerie, calomnie -> admiration de la noblesse -> se proposer de se conformer non pas à un modèle subjectif et empirique d'humanité mais à l'idéal universel, générique de l'homme -> tort du méchant : ne pas pouvoir sortir de lui-même. Sa démarche : borner le domaine de l'homme -> petitesse. Extrémisme des détracteurs qui invoque l'échec pour discréditer une démarche. Maximalisme de Sénèque qui accrédite la philosophie au nom même de ses échecs. "viser à des accomplissements impossibles" -> échec inévitable dans la conformité. C'est déjà une "conduite" que les paroles des philosophes. Action, faire = dire. Ici, anticipation de Austin (philosophe anglais du début du

20°S) = certaines paroles doivent être considérées comme ayant une valeur performative -> parole = action => valeur performative de la parole philosophique. Adéquation entre les mots et les actions => on ne peut plus disqualifier l'homme de bien. On ne peut lui objecter la fausseté de l'idéal qu'il prône parce qu'il ne s'y conforme pas. Par paroles, le philosophe fait mais on peut se demander : mais que fait-il? Pour Sénèque, il fait beaucoup: par l'élévation même de ses conceptions, assigne un sens, contenu à l'idéal du bonheur. Valeur performative de la parole philosophique qui varie en proportion inverse de la conformité qu'on reproche à l'homme qu'il prône, plus il fait pour ses semblables en leur proposant un idéal d'une plus parfaite idéalité.

2°) Théorie des "préférables" : Extrémisme de ses détracteurs vient du fait qu'ils sont imbus de la croyance que l'idéal ne se conçoit que d'après la vie qu'ils mènent -> celui qui prône la vertu doit en être imprégné. Réponse de Sénèque : sage seul à pouvoir incarner la vertu et sage =/= homme de bien. Sage = idéal incarné, souverain bien atteint. -> bien hors de l'idéal ? Atténue le paradoxe d'un idéal d'autant plus idéal qu'il est inaccessible à l'homme du commun. Idée que Stoïcisme = doctrine puritaine finie ici. Puritanisme fait de ses adversaires = soit tu fais ce que tu dis soit tu te tais. Position doctrinale orthodoxe : épicurisme : loi de la nature = recherche les plaisirs et éviter la douleur. Conclusion hâtive selon les stoïciens, pour eux loi de la nature = conservation de soi -> préserver et développer ses possibilités natives : se régler sur la nature /// obéir à la nature => faire usage de la raison -> vertu idéale. Conservation de soi : on s'intéresse à tout ce qui concrètement permet la conservation -> théorie des préférables : instrument de l'acclimatation de la doctrine à la vie des hommes. P63 : le philosophe dit son dédain, mépris =/= nécessaire privation : "toute ces choses doivent être dédaignées, c'est pour les posséder sans inquiétude" -> austérité =/= abstinence -> confusion : preuve du manque de discernement de l'opinion, typique de l'extrémisme puritain. -> relativisation, sens de la juste mesure pour parvenir à ce tour de force qui consiste à ne pas chasser les biens, "mais quand elles s'éloignent, il les regarde partir sans trouble". Homme de bien parvient à ce tour de force car possède la vertu = source de mesure. Vertu en elle-même mesure => c'est en elle qu'est le bien souverain. C'est à elle qu'il convient de tout rapporter pour juger de la vertu. Normativité rationnelle procède de la normalité naturelle. Il est naturel d'être animé par la volonté de conservation même si on dédaigne la vie - santé - richesse => ce ne sont pas des biens même si sont préférables à leurs contraires. On peut dédaigner la vie et vivre car dédain : on ne tient pas la vie pour un bien car il est naturel de préférer vivre plutôt que de mourir. La raison ne fait qu'approuver la conduite prétendument non conforme en réglant sa vie en prenant en compte les préférables. Sagesse relative de l'homme de bien : faire la part de ses avantages qui sont toutes ces choses qui serait contre nature et donc insensé de se priver dès lors qu'elles sont mises à disposition (p66). P73 : "les richesses ne sont pas un bien : si elles l'étaient elles rendraient les gens vertueux". "je convient qu'il faille les posséder et qu'elles apportent à la vie de grandes commodités" => il n'y a pas d'autre bien que le bien véritable, souverain /// que l'idéal /// que la vertu = théorie des "préférables neutres", des "avantages indifférents", inassimilables aux biens, sont tributaires de la vertu de chacun => théorie des préférables rend la doctrine stoïcienne vivable, sauve le stoïcisme de l'idéalisme.

V] LA VIE HEUREUSE : CITATIONS IMPORTANTES : p15 : "vivre heureux, ô mon frère Gallion, qui ne le désire!" P18 : "comme chacun aime mieux croire que juger, lorsqu'il s'agit de la vie, on ne juge jamais, on croit toujours" P19 : "la preuve du pire, c'est la foule" "ce qu'en vérité il vaut mieux faire et non ce qui est le plus en usage" "c'est à l'âme qu'il incombe de découvrir le bien de l'âme" "si seulement celle-ci avait le loisir de respirer et de faire retour sur elle-même" P21 : "recherchons un bien qui ne vaille pas par sa seule apparence, mais qui soit solide, permanent et d'une beauté d'autant plus grande qu'elle est plus secrète" "il n'y a pas à le chercher bien loin : on le trouvera, il suffit de savoir vers quoi tendre la main" P22 : "je me règle sur la nature […] voilà la sagesse" "la Vie Heureuse, c'est donc celle qui est en accord avec sa propre nature" "que si l'âme est d'abord saine" P23 : "tranquillité, liberté perpétuelles" "puis la paix et l'harmonie de l'âme" P24 : " l'homme heureux est celui pour qui il n'est rien de bon ou de mauvais hormis une âme bonne ou mauvaise" P25 : "l'homme [heureux] met sa joie dans ce qu'il possède et ne désire rien de plus que ce qu'il a en soi" P26 : ""on peut appeler heureux celui qui est exempt de désirs grâce aux bienfaits de la raison" P27 : "la vie heureuse se fonde alors sur un jugement droit et assuré. Car alors l'âme est pure et délivrée de tous les maux" "chatouillé" "l'âme aussi aura ses voluptés" P28 : "choisir un mal au lieu d'un bien" (volupté) "heureux celui dont le jugement est droit" "heureux celui qui aime ce qu'il possède" P29 : "la volupté conduit à la vie la plus ignoble" P30 : "même si elle n'est pas souvent accompagnée de beaucoup de volupté, n'en est jamais privée complètement" P31 : "le souverain bien est immortel" "[la volupté] au moment même où elle charme le plus, elle regarde déjà sa fin" P32 : "c'est la nature qu'on doit prendre pour guide : c'est sur elle que se règle la raison" "c'est donc le même chose de vivre heureux et de vivre selon la nature" P33 : "l'artisan de sa vie" P35 : "le plaisir n'est ni le prix ni la cause de la vertu, mais quelque chose qui vient en surplus " P36 : "elle ne procure rien qui vaille mieux qu'elle, étant elle même sa propre récompense" "c'est le bien de l'homme que je recherche et non celui du ventre" P43 : "je suis pour ma part d'avis[…] que les enseignements d'Épictète sont vénérables et justes" P46 : "ceux qui ont abandonné les rênes à la volupté, […] c'est la volupté qui les possède " P50 : "que le souverain bien s'élève donc jusqu'en un lieu d'où aucune force ne puisse l'arracher […] or seule la vertu peut s'élever jusque là" "<< suis ton Dieu >>" "quelle folie de se laisser traîner plutôt que de suivre" P51 : "nous sommes engagés à supporter ce qui est propre à notre condition de mortel" "obéir à la divinité, voilà la liberté" "donc, c'est sur la vertu que s'édifie le véritable bonheur" P52 : "afin que, dans la mesure où cela est permis, tu imites la divinité" "la vertu suffit pour vivre heureux" "celui qui recherche la vertu a besoin d'une certaine clémence de la fortune" P55 : "ô individus mal intentionnés" P56 : "à Platon, à Épicure, à Zénon" "tous ont dit non pas comment ils vivaient eux - mêmes, mais comment ils auraient dû vivre" "c'est de la vertu et non de moi que je parle" P59 : "ceux qui n'ont l'esprit tourné que vers eux - mêmes sont écartelés par autant de croix qu'ils ont de convoitises" P60 : "l'homme véritable se doit d'admirer, même lorsqu'ils chutent, ceux qui accomplissent de grands efforts" P63 : "toutes ces choses doivent être dédaignées,[…] c'est pour les posséder sans inquiétude" P73 : "les richesses ne sont pas un bien un bien ; si elles l'étaient, elles rendraient les gens vertueux" "je conviens qu'il faille les posséder et qu'elles apportent à la vie de grandes commodités" P79 : "celui qui enlèvera ses richesses au sage lui laissera ton son bien"